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Page:Michelet - OC, Les Femmes de la Révolution, Les Soldats de la Révolution.djvu/345

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DESAIX

En mai 92, il demanda à rentrer dans son régiment et passa à l’armée du Rhin.

La première occasion révéla son grand cœur et fit deviner un héros.

Sorti près de Landau, il distingue de loin, dans la plaine, quelques-uns de nos cavaliers aux prises avec l’ennemi. Ils étaient sortis en reconnaissance et se trouvaient surpris ; les Autrichiens avaient bravement lancé sur eux cinq escadrons. Desaix est indigné. Il est sans armes, qu’importe ! Il part, la cravache à la main. Il se jette à l’aveugle dans la mêlée, il est renversé, se relève ; les nôtres, enfin, se dégagent, et Desaix, rentrant avec eux, ramène encore un Autrichien.

Tel fut le commencement de ce grand homme, et telle toute sa vie, inspirée constamment d’un sentiment de justice héroïque.

En Égypte, les Arabes le nommèrent Sultan juste. Ce fut en effet plus qu’un héros, ce fut un juste juge. Et pour lui, le premier point dans la justice fut d’appuyer les faibles.

Dans la guerre d’Allemagne, les habitants virent bien qu’il faisait la guerre aux soldats, jamais au peuple. Ils dormaient sur leur foi profonde dans sa justice. Prêts à fuir avec leur famille à l’approche de l’armée, les paysans rentraient tranquillement : « Pour aujourd’hui nous n’avons rien à craindre, disaient-ils, c’est le corps de M. Desaix ! »