Page:Mickiewicz - Les Slaves, tome 1.djvu/123

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parmi les Slaves, les Illyriens et les Cosaques, et ce qu’elle a de plus beau, elle le doit à des inspirations toutes chrétiennes.

L’oubli de l’histoire païenne a donné lieu à des plaintes également stériles et injustes, puisque les débris en ont été réunis et conservés précisément par les auteurs chrétiens. Le peuple a de lui-même renoncé à cette histoire, ou, pour mieux dire, il l’a fondue dans un seul récit symbolique sur l’arrivée des trois frères Lech, Czech et Russe. Ces trois noms lui rappellent la fraternité primitive de la race et sa séparation en trois empires. Il ne sait rien de plus sur son origine ; il a complètement oublié toutes les traditions qui pourraient le ramener à un berceau commun. Quant aux regrets des slavophiles qui prétendent que la création des trois empires a détruit l’unité slave, ils ne nous semblent pas avoir plus de fondement. Cette unité n’a jamais existé. L’unité des peuples ne se trouve écrite que sur la première page de la Bible ; elle se retrouvera, nous l’espérons, sur la dernière page de la vraie philosophie. Avant l’histoire politique, aucun lien général ne reliait les Slaves entre eux ; cette histoire elle-même n’a constamment travaillé qu’à détruire des caractères communs dont il n’existe presque plus de traces aujourd’hui. Le Polonais voit dans le Russe un homme d’origine étrangère ; les Serbes et les Bohèmes ne se regardent pas comme issus de la même souche que les peuples slaves du nord. L’idée du Panslavisme, ou unité slave, n’a commencé à poindre que dans le siècle dernier ; elle est le fruit de travaux scientifiques et