Page:Mickiewicz - Les Slaves, tome 1.djvu/139

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titulé, Zaboï-Slavoï-Ludiek, mérite particulièrement notre attention.

Quel est le combat qu’il retrace ? Est-ce celui que les Bohêmes livrèrent à Louis le Germanique, au milieu du ixe siècle ? Quelques auteurs le font remonter à une époque bien plus ancienne, à l’année 630. Il s’agirait, suivant cette version, de la victoire que Same, à la tête des Slaves, remporta sur l’un des généraux. de Dagobert, roi des Francs. Zaboï, l’un des héros du poëme, ne serait autre que Same lui-même ; sans prétendre résoudre ici cette question controversée, nous allons lire ce fragment.

« Dans la forêt Noire, s’élève un rocher ; sur le rocher monte le vaillant Zaboï. Il promène ses regards autour de lui, et il s’afflige à la vue de ces pays, de tous ces pays. Et il gémit comme le ramier sauvage. Longtemps assis et sanglotant, tout à coup il s’é1ance comme un cerf à travers les vallées et les forêts, à travers les forêts vastes et silencieuses, Il se hâte de courir de l’homme à l’homme, du guerrier au guerrier, par toute la contrée ; il dit, bas à l’oreille de chacun, des paroles brèves, puis il court plus loin.

» Et le premier jour s’est écoulé, et le second jour s’est écoulé ; mais quand la troisième lune éclaire de nouveau la nuit, des hommes sont réunis dans la forêt Noire. Zaboï vient à eux, il les fait descendre dans un ravin profond, dans le plus profond des ravins boisés. Il descend plus bas encore et saisit un luth harmonieux. Il chante :

» — Hommes aux cœurs fraternels, aux yeux en-