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INTRODUCTION.


Aux articles qui les concernent nous en ferons sentir toute la force. Mais les courtes observations que nous venons de présenter suffisent pour montrer que la religion est le seul fondement de la morale, qu’elle en est la base la plus solide, la plus complète et la plus puissante.

XIII. Avant de passer à la seconde partie de cette Introduction, nous devons répondre à une grande objection de nos adversaires. Ils veulent séparer la morale de la religion, parce que l’histoire nous présente une foule de cultes inhumains et bizarres, de divinités corrompues et corruptrices. Allier la morale à la religion, c’est donc vouloir l’unir à la corruption. Cette manière de raisonner est bien étrange. Lorsque nous demandons l’union de la morale et de la religion nous ne parions que de la religion véritable, qui ne peut pas être plus responsable des rêveries des imposteurs en fait de morale qu’en fait de dogme. Mais il n’y a rien de plus odieux que ces imposteurs qui nous parlent de morale, lorsqu’ils en détruisent jusqu’aux fondements et qui nous vantent leur système sans avoir posé la première pierre de l’édifice, Lorsqu’ils disent qu’en voulant lier la morale à la religion on les dénature l’une et l’autre, ils se montrent très-mal instruits c’est au contraire en voulant les séparer que les philosophes ont perverti l’une et l’autre. En méditant sur les sources de la perversité du paganisme, on y trouve précisément le besoin de se soustraire à l’autorité du Dieu vengeur du vice. Nos philosophes font mieux ils ne prennent pas la peine de changer les dieux, ils disent qu’ils ne se mêlent pas de morale. Il est dans l’antiquité un fait qui parle haut en faveur de l’alliance de la religion et de la morale. Il est constant que de tous les moralistes anciens les meilleurs ont été les pythagoriciens or, ils fondaient la morale et les lois sur la volonté de Dieu.Toutes les sectes qui ont fait profession de mépriser la religion se sont déshonorées par une morale détestable. Il en est de même de nos philosophes modernes, dit Dernier.

ARTICLE II.
histoire de la morale.

XIV. On s’occupe beaucoup de l’histoire des peuples ; mais il est une histoire beaucoup plus intéressante pour le monde c’est celle de la morale. En étudiant les mœurs de tous les temps et chez tous les peuples, on y recueillerait en passant quelque grand enseignement mais surtout on y apprendrait à estimer la loi de l’Evangile à sa juste valeur. Nous allons essayer de donner ici une esquisse légère de l’histoire de la morale. Nous regrettons que l’étendue de cette Introduction ne nous permette pas de la développer davantage. Pour mettre un peu d’ordre dans cette matière, nous ramenons à quatre chefs ce que nous allons dire de l’histoire de la morale. Nous en ferons connaître l’état, 1o sous les patriarches, 2o sous la loi de Moïse, 3o chez les païens, 4’sous la loi de l’Evangile.

§ Ier
De la morale des patriarches.

XV. Nous n’avons d’autre monument pour juger de la morale des patriarches, que la narration que nous en a faite Moïse. L’homme, suivant le récit de ce grand historien, ne fut pas obligé d’acquérir ses premières connaissances par la voie ordinaire Dieu se chargea de l’instruire,

L’histoire mosaïque avant le déluge est fort courte. Nous voyons Caïn et Abel offrir des sacrifices. Nous assistons au meurtre d’Abel ; nous y lisons le remords et l’effrayant désespoir du fratricide. Il y avait à cette époque des prédicateurs de justice et de religion qui annonçaient aux hommes la volonté de Dieu et sa loi, et qui les exhortaient, en son nom et par son autorité, à l’accomplir fidèlement et selon l’ordre et l’étendue de leur pouvoir. L’apôtre saint Pierre (Ep. II, cap. ii, v. 5) rend ce glorieux témoignage à Noé. Tel était aussi Enoch cet homme d’une vertu si éminente, et probablement encore plusieurs autres. Mais, malgré toutes ces admirables leçons, les hommes se laissèrent entraîner aux plus grands désordres ils méprisèrent la loi de Dieu, qu’ils ne pouvaient méconnaître ; ils se livrèrent à toutes sortes de débauches, de violences, de rapines et de méchancetés ; ils tombèrent dans une espèce d’athéisme négligeant et méprisant toute religion. C’est pourquoi saint Pierre appelle le monde de ce siècle pervers un monde sans Dieu. De si grands crimes attirèrent sur la terre le plus effroyable châtiment que l’imagination puisse concevoir tout fut détruit par le déluge, excepté Noé et sa famille.Le second père du genre humain reçut de nouvelles communications du Seigneur. Le récit de Moïse et les traditions juives nous laissent entendre que Dieu renouvela la publication de la loi morale. Quelle était la teneur de cette loi ? nous l’ignorons. Mais ces divins enseignements ne furent pas mieux suivis que les premiers, et nous assisterons à un effroyable égarement des mœurs. Voilà tout ce que nous pouvons dire de la morale primitive.

§ II.
De la morale judaïque.

XVI. L’abandon de la foi, la corruption des mœurs, l’oubli des vérités les plus saintes, avaient forcé le Seigneur à se choisir un peuple. Il avait confié à sa garde le dépôt sacré de sa doctrine. Mais bientôt la barrière devint impuissante, l’idolâtrie rompait les digues qu’on lui avait opposées. Le peuple hébreu chancela dans sa foi sur la terre d’Egypte. Non content de le tirer de la maison de servitude, le Seigneur voulut lui donner par écrit un code de lois. Ce code est un phénomène unique dans les annales du genre humain ; il embrasse tous les devoirs religieux, moraux, politiques et civils. Quoique faites d’un seul jet, ces lois sont si bien appropriées aux besoins du peuple pour lequel elles ont été formées, que durant quinze