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Page:Migne - Encyclopédie théologique - Tome 49.djvu/8

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seule et même chose) était compose de métal il affirme qu’il ne pouvait ni entendre, ni parler, ni servir d’instrument au diable pour la parole. D’après lui, Albert, qui était fort instruit dans les sciences mathématiques, et qui avait déjà inventé plusieurs machines ingénieuses, aura pu composer, au moyen d’une certaine combinaison de ressorts, une tête ou un personnage tout entier capable d’exécuter des mouvements et de proférer des paroles. Maintenant, jusqu’à quel point de perfection cette machine était-elle portée ? C’est ce qu’on ne saurait dire. Il ne fallait pas qu’elle fût irréprochable pour exciter l’admiration, dans un temps où l’on était si peu avancé en mécanique. Le père Théophile Raynaud dit seulement que la tête-automate d’Albert était si artistement composée, que l’air qu’on y soufflait pouvait prendre les modifications requises pour former la voix humaine. Du reste, aucun détail sur la composition du mécanisme.

« Jean Muller, plus connu sous le nom de Regiomontanus, célèbre astronome du xve siècle, passe pour avoir exécuté deux automates qui n’ont point de rapport avec les androïdes musiciens mais que l’on croit pouvoir signaler ici. L’un était un aigle (nous ne parlons que sur la foi de certains écrivains), un aigle qui avait la faculté de voler et de se diriger dans l’air. La perfection du mécanisme qui faisait agir cet oiseau était telle, qu’on le vit aller à la rencontre de l’empereur, lors de son entrée à Ratisbonne, et revenir jusqu’à la ville en planant au-dessus de sa tête. L’autre automate était une mouche de fer, que Regiomontanus s’amusait souvent à laisser s’envoler lorsqu’il était assis à une table nombreuse, qui faisait le tour de la chambre en bourdonnant à l’oreille des convives et revenait se poser sur sa main. On comprend l’homme-automate marchant par des moyens mécaniques ; on croirait peut-être à l’histoire de l’aigle, si l’écrivain auquel on en doit le récit ne lui prêtait l’intelligence d’aller se placer au-dessus de la tête de l’empereur mais le phénomène de cette mouche de fer ne saurait être admis que par des gens doués d’une crédulité robuste

« Aulu-Gelle nous apprend qu’Architas avait construit un pigeon de bois qui pouvait voler au moyen d’une puissance cachée, par laquelle il contre-balançait la force d’attraction qui tendait à le rapprocher de la terre.

« Une opinion fortement accréditée attribue aussi à Roger Bacon la création d’une tête d’airain qui parlait, et qui même avait le don de prophétiser. L’historien Maeyer nous apprend que, suivant le sentiment public, ce moine illustre et son frère de religion, Thomas Bungey travaillèrent sept ans à forger cette tête pour savoir d’elle s’il n’y aurait pas moyen d’entourer toute l’Angleterre d’un gros mur. Le naïf écrivain ajoute qu’ils ne purent pas bien saisir la réponse de l’oracle, parce que, n’étant pas


préparés à la recevoir si tôt, ils s’étaient occupés d’autre chose que de prêter l’oreille à son discours. Quoi qu’il en soit, il est certain que Roger Bacon passait pour communiquer avec les puissances occultes, et que dans des comédies on l’a souvent représenté comme un grand magicien. Sa tête d’airain était probablement, ainsi que l’androïde d’Albert le Grand une pièce de mécanique ingénieusement conçue.

« Il paraît que la construction des automates fut négligée pendant une longue période de temps, et que le goût de ces sortes de machines s’éteignit insensiblement, car on n’en voit point de cités depuis le xve jusqu’au xviie siècle. Les plus célèbres de cette époque furent ceux imagines par Vaucanson. On ne saurait nier que le joueur de flûte de ce dernier ne fût une création dans la pratique des arts mécaniques. La description qu’il en fit à l’académie des sciences de Paris, dans le courant de l’année 1738, reçut de ce corps savant une éclatante approbation, et les expositions publiques, où il parut, eurent du retentissement dans toute l’Europe. La grandeur de la figure était de cinq pieds et demi environ elle était assise sur un fragment de rocher supporté par un piédestal carré de quatre pieds et demi de haut sur trois et demi de large. Au moyen d’un mécanisme dont la description serait trop étendue, l’automate jouait douze airs différents en donnant au son toutes les variétés de force et de douceur, ainsi qu’eût pu le faire un habile ai liste. Six soufflets marchant alternativement envoyaient l’air à un réservoir commun d’où il était poussé par un tube jusqu’aux lèvres sur lesquelles était appuyée l’embouchure de la flûte. Les doigts, mus par un mécanisme ingénieux, ouvraient et fermaient les trous de l’instrument avec une précision parfaite et suivant qu’il fallait produire tel ou tel son. L’inventeur de cette belle machine était fort jeune lorsqu’il en conçut le plan ; elle fut imaginée tout d’un jet et exécutée sans changement notable, tant ses différentes parties avaient été bien ordonnées. Le jour où Vaucanson l’essaya pour la première fois, son domestique pensa perdre la tête dès les premiers sons qu’elle fit entendre, et lui sauta au cou en pleurant lui-même ne put retenir ses larmes.

« Le second automate de Vaucanson fut une figure habillée en berger d’opéra qui jouait une vingtaine d’airs, de menuets, de rigodons et de contredanses. On pensait généralement que les obstacles avaient été moindres pour cette mécanique que pour celle du joueur de flûte, mais il paraît au contraire qu’ils furent si grands, que Vaucanson fut mainte fois sur le point de l’abandonner. L’automate soufflait dans un flageolet provençal tout en frappant, au moyen d’une baguette, sur un tambourin de Marseille. Ce flageolet provençal, instrument ingrat s’il en fut, n’était percé que de trois trous ; il fatiguait excessivement le musicien, parce qu’il nécessitait une dépense