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ASSEMBLÉE CONSTITUANTE.

tête d’un régiment de cavalerie. Mais il n’était plus temps ; lorsqu’il arriva à Varennes, le roi en était parti depuis plusieurs heures ; ses escadrons étaient fatigués et refusaient d’aller plus avant. Les gardes nationales étaient partout sous les armes, et il ne lui resta plus, après le mauvais succès de son entreprise, qu’à quitter l’armée et la France.

L’assemblée, en apprenant l’arrestation du roi, envoya pour commissaires auprès de lui, trois de ses membres, Pétion, Latour-Maubourg et Barnave : ils joignirent la famille royale à Épernay, et retournèrent avec elle. Ce fut pendant ce voyage que Barnave, touché du bon sens de Louis XVI, des prévenances de Marie-Antoinette et du sort de toute cette famille royale si abaissée, lui témoigna le plus vif intérêt. Dès ce jour, il lui prêta ses conseils et son appui. Le cortége, en arrivant à Paris, traversa une foule immense qui ne fit entendre ni applaudissements ni murmures, et qui garda un long silence improbateur.

Le roi fut provisoirement suspendu ; on lui donna une garde ainsi qu’à la reine ; des commissaires furent nommés pour l’interroger. Tous les partis s’agitèrent : les uns voulaient le maintenir sur le trône malgré sa fuite ; les autres prétendaient qu’il avait abdiqué, en condamnant, dans un manifeste adressé aux Français lors de son départ, et la révolution et les actes émanés de lui pendant cette époque, qu’il appelait un temps de captivité.

Le parti républicain commençait alors à paraître. Jusque là il avait été ou dépendant ou caché, parce qu’il n’avait pas eu d’existence propre ou de prétexte pour se montrer. La lutte qui s’était engagée d’abord entre l’assemblée et la cour, ensuite entre les constitutionnels et les aristocrates, en dernier lieu entre les constitutionnels eux-mêmes, allait commencer entre les constitutionnels et les républicains. Telle est, en temps de révolution, l’inévitable marche des choses. Les partisans de l’ordre nouvellement établi se réunirent alors, et renoncèrent à des dissidences qui n’étaient pas sans inconvénient pour leur cause, lors même que l’assemblée était toute-