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ASSEMBLÉE CONSTITUANTE.

lieu ; ce fut dans le même esprit qu’elle leur interdit d’accepter, pendant quatre ans, aucun emploi conféré par le prince. Cette manie de désintéressement entraîna bientôt Lafayette à se démettre du commandement de la garde nationale, et Bailly de la mairie ; aussi cette époque remarquable finit en entier avec la constituante, et il n’en resta plus rien sous la législative.

La réunion des décrets constitutionnels en un seul corps fit naître l’idée de les réviser. Mais cette tentative de révision excita un extrême mécontentement, et fut à peu près nulle ; il ne convenait pas de rendre après coup la constitution plus aristocratique, de peur que la multitude ne la voulût encore plus populaire. Pour enchaîner la souveraineté de la nation, et en même temps pour ne pas la méconnaître, l’assemblée déclara que la France avait le droit de revoir sa constitution, mais qu’il était prudent de ne pas user de ce droit pendant trente ans.

L’acte constitutionnel fut présenté au roi par soixante députés ; la suspension fut levée : Louis XVI reprit l’exercice de son pouvoir, et la garde que la loi lui avait donnée fut sous son commandement. Redevenu libre, la constitution lui fut soumise. Après plusieurs jours d’examen : « J’accepte la constitution, écrivit-il à l’assemblée ; je prends l’engagement de la maintenir au dedans, de la défendre contre les attaques du dehors, et de la faire exécuter par tous les moyens qu’elle met en mon pouvoir. Je déclare qu’instruit de l’adhésion que la grande majorité du peuple donne à la constitution, je renonce au concours que j’avais réclamé dans le travail ; et que, n’étant responsable qu’à la nation, nul autre, lorsque j’y renonce, n’a le droit de s’en plaindre. »

Cette lettre excita de vifs applaudissements. Lafayette demanda et fit décréter une amnistie en faveur de ceux qui étaient poursuivis pour le départ du roi, ou pour des faits relatifs à la révolution. Le lendemain le roi vint lui-même accepter la constitution dans l’assemblée. La foule l’y accompagna de ses acclamations ; il fut l’objet de l’enthousiasme des députés et des tribunes, et ce jour-là il obtint de nouveau la confiance et l’affection du peuple. Enfin le 29 septembre fut marqué pour