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RÉVOLUTION FRANÇAISE.

l’assemblée constituante, qui avait été satisfaite de ses réponses ; enfin, après le 10 août, en rejetant tous les actes publics sur la responsabilité ministérielle, et en niant toutes les démarches secrètes qui lui étaient personnellement attribuées. Ces dénégations ne détruisaient pas, aux yeux des conventionnels, des faits la plupart constatés par des pièces écrites ou signées de la main même de Louis XVI ; mais il usait du droit naturel à tout accusé. C’est ainsi qu’il ne reconnut pas l’existence de l’armoire de fer et toutes les pièces qui lui furent présentées. Louis XVI invoquait une loi de sauvegarde, que la convention n’admettait pas, et la convention cherchait à s’assurer des tentatives contre-révolutionnaires que Louis XVI ne voulait pas reconnaître.

Lorsque Louis fut retourné au Temple, la convention s’occupa de la demande qu’il avait faite d’un défenseur. Ce fut en vain que quelques Montagnards s’y opposèrent, la convention décréta que Louis aurait un conseil. Il désigna Target et Tronchet : le premier refusa. Ce fut alors que le vénérable Malesherbes s’offrit à la convention pour défendre Louis XVI. « J’ai été appelé deux fois, écrivit-il, au conseil de celui qui fut mon maître, dans le temps que cette fonction était ambitionnée par tout le monde ; je lui dois le même service, lorsque c’est une fonction que bien des gens trouvent dangereuse. » Sa demande lui fut accordée. Louis XVI, dans son état d’abandon, fut touché de cette preuve de dévouement. Lorsque Malesherbes entra dans la chambre, il alla vers lui, le serra dans ses bras, et, les yeux humides, il lui dit : » Votre sacrifice est d’autant plus généreux, que vous exposez votre vie, et que vous ne sauvez pas la mienne. » Malesherbes et Tronchet s’occupèrent sans interruption de sa défense, et s’associèrent M. Desèze ; ils cherchaient à ranimer le courage du roi, mais ils le trouvaient peu facile à espérer. « J’en suis sûr, ils me feront périr : mais n’importe, occupons-nous de mon procès, comme si je devais le gagner ; et je le gagnerai en effet, puisque la mémoire que je laisserai sera sans tache. »

Enfin le jour de la défense arriva. Elle fut prononcée par