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CONVENTION NATIONALE.

des députés ; elle échappa à Danton et à la Montagne, et elle échut à Robespierre, à Marat et à la commune. Dès le soir du 31, un député jacobin dit : « Qu’il n’y avait que la moitié de fait, qu’il fallait achever, et ne pas laisser le peuple se refroidir. » Henriot offrit au club de mettre à sa disposition la force armée. Le comité insurrectionnel s’établit ouvertement près de la convention. Toute la journée du 1er juin fut consacrée à préparer un grand mouvement. La commune écrivit aux sections : Citoyens, restez debout ; les dangers de la patrie vous en font une loi suprême. Le soir, Marat, qui fut le principal auteur du 2 juin, se rendit à l’Hôtel-de-Ville, monta lui-même à l’horloge, et sonna le tocsin ; il invita les membres du conseil à ne pas désemparer qu’ils n’eussent obtenu le décret d’accusation contre les traîtres et les hommes d’état. Quelques députés se réunirent dans la convention, et les conspirateurs vinrent demander le décret contre les proscrits ; mais ils n’étaient pas encore assez en force pour les arracher à la convention.

Toute la nuit se passa en préparatifs ; le tocsin sonna, la générale battit, les rassemblements se formèrent. Le dimanche matin, vers huit heures, Henriot se présenta au conseil général, et déclara à ses complices, au nom du peuple insurgé, qu’on ne déposerait les armes qu’après avoir obtenu l’arrestation des députés conspirateurs. Il se mit ensuite à la tête des immenses attroupements qui étaient sur la place de l’Hôtel-de-Ville, les harangua, et donna le signal du départ. Il était près de dix heures lorsque les insurgés arrivèrent sur la place du Carrousel. Henriot plaça autour du château les bandes les plus dévouées, et bientôt la convention fut investie par quatre-vingt mille hommes, dont le plus grand nombre ignorait ce qu’on exigeait de lui, et était plus disposé à défendre qu’à attaquer la députation.

La plupart des proscrits ne s’étaient point rendus dans l’assemblée. Quelques-uns, courageux jusqu’au bout, étaient venus braver l’orage pour la dernière fois. Dès le commencement de la séance, l’intrépide Lanjuinais monte à la tribune. « Je