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RÉVOLUTION FRANÇAISE.

demande, dit-il, à parler sur la générale qui bat dans tout Paris. » Il est aussitôt interrompu par les cris à bas ! à bas ! il veut la guerre civile ! il veut la contre-révolution ! il calomnie Paris ! il insulte le peuple ! Malgré les menaces, les outrages, les cris de la Montagne et des tribunes, Lanjuinais dénonce les projets de la commune et des factieux ; son courage augmente avec ses périls. « Vous nous accusez, dit-il, de calomnier Paris ! Paris est pur, Paris est bon, Paris est opprimé par des tyrans qui veulent du sang et de la domination. » Ces paroles deviennent le signal du plus violent tumulte ; plusieurs députés montagnards se précipitent vers la tribune pour en arracher Lanjuinais, qui s’y attache fortement, et qui, avec l’accent du plus généreux courage, s’écrie encore : « Je demande que toutes les autorités révolutionnaires de Paris soient cassées ; je demande que tout ce qu’elles ont fait depuis trois jours soit nul ; je demande que tous ceux qui voudront s’arroger une autorité nouvelle, contraire à la loi, soient mis hors la loi, et qu’il soit permis à tout citoyen de leur courir sus. » À peine a-t-il achevé, que les pétitionnaires insurgés viennent demander son arrestation et celle de ses collègues. « Citoyens, disent-ils en finissant, le peuple est las de voir ajourner son bonheur, il le laisse encore un instant dans vos mains ; sauvez-le, ou nous vous déclarons qu’il va se sauver lui-même ! »

La droite demande l’ordre du jour sur la pétition des insurgés. La convention passe à l’ordre du jour. Aussitôt les pétitionnaires sortent dans une attitude menaçante, les hommes quittent les tribunes, on crie aux armes, et un grand bruit se fait entendre au dehors. Sauvez le peuple, dit un Montagnard, sauvez vos collègues en décrétant leur arrestation provisoire. — Non, non, répondent la droite et même une partie de la gauche. — Nous partagerons tous leur sort, s’écrie Larévellière-Lépeaux. Le comité de salut public, chargé de faire un rapport, épouvanté de la grandeur du péril, proposa, comme au 31 mai, une mesure en apparence conciliatoire, pour satisfaire les insurgés sans sacrifier entièrement