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CONVENTION NATIONALE.

l’Argone, la victoire de Valmy, de Jemmapes, l’invasion de la Belgique. La lutte de la Montagne et de la Gironde, de Dumouriez avec les Jacobins, ramena de nouveau le désaccord entre l’armée et le gouvernement, détruisit la confiance des troupes, qui éprouvèrent des revers subits et nombreux. Il y eut défection de la part de Dumouriez, comme il y avait eu retraite de la part de Lafayette. Après le 31 mai, qui renversa le parti de la Gironde, après que le comité de salut public se fut assis, et qu’il eut remplacé les généraux girondins Dumouriez, Custine, Houchard, Dillon, par les généraux montagnards Jourdan, Hoche, Pichegru, Moreau, après qu’il eut rétabli le mouvement révolutionnaire par les mesures hardies dont nous avons rendu compte, on vit la campagne de l’Argone et de la Belgique, renouvelée dans celle de 1794, et le génie de Carnot égaler celui de Dumouriez, s’il ne le surpassa point.

Pendant la durée de cette guerre, le comité de salut public se livra aux plus terribles exécutions. Les armées se bornent à tuer sur le champ de bataille : il n’en est pas de même des partis qui, dans les situations violentes, craignant de voir renaître le combat après la victoire, se précautionnent contre de nouvelles tentatives par des rigueurs inexorables. L’usage de tous les gouvernements étant d’ériger leur conservation en droit, ceux qui les attaquent sont pour eux des ennemis tant qu’ils combattent, des conspirateurs dès qu’ils sont vaincus, et ils les tuent ainsi au moyen de la guerre et au moyen de la loi. Tous ces motifs dirigèrent à la fois la politique du comité de salut public, politique de vengeance, de terreur et de conservation pour lui-même. Voici les maximes d’après lesquelles il se conduisit à l’égard des villes insurgées. « Le nom de Lyon, dit Barrère, ne doit plus exister. Vous l’appellerez Ville-affranchie, et sur les ruines de cette infâme cité, il sera élevé un monument qui attestera le crime et la punition des ennemis de la liberté. Ce seul mot dira tout : Lyon fit la guerre à la liberté, Lyon n’est plus. » Pour réaliser cet effrayant anathème, le comité envoya dans cette malheureuse