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RÉVOLUTION FRANÇAISE.

nion. La constitution de 1793 conduisait au calendrier républicain, et le calendrier républicain à l’abolition du culte chrétien. Nous verrons bientôt la commune et le comité de salut public proposer chacun leur religion, la commune le culte de la Raison, le comité de salut public le culte de l’Être Suprême. Mais il faut auparavant rendre compte d’une nouvelle lutte entre les auteurs eux-mêmes de la catastrophe du 31 mai.

La commune et la Montagne avaient opéré cette révolution contre la Gironde, et le comité seul en avait profité. Pendant les cinq mois dont il vient d’être rendu compte, de juin à novembre, le comité, ayant pris toutes les mesures de défense, était naturellement devenu la première puissance de la république. Le combat se trouvant en quelque sorte fini, la commune aspira à dominer le comité, et la Montagne à ne pas l’être par lui. La faction municipale était le dernier terme de la révolution. Opposée de but au comité de salut public, elle voulait, au lieu de la dictature conventionnelle, la plus extrême démocratie locale, et au lieu de culte, la consécration du matérialisme. L’anarchie politique et l’athéisme religieux, tels étaient les symboles de ce parti, et les moyens par lesquels il comptait établir sa propre domination. Une révolution est l’effet des divers systèmes qui ont agité le siècle dont elle est originaire. Ainsi, pendant la durée de la crise en France, le catholicisme ultramontain fut représenté par le clergé réfractaire ; le jansénisme, par le clergé constitutionnel ; le déisme philosophique, par le culte de l’Être Suprême, qu’institua le comité de salut public ; le matérialisme de la société d’Holbach, par le culte de la Raison et de la Nature, que fit décréter la commune. Il en fut de même pour les opinions politiques, depuis la royauté de l’ancien régime jusqu’à la démocratie sans borne de la faction municipale. Cette dernière avait perdu, dans Marat, son principal appui et son véritable chef, tandis que le comité de salut public avait conservé le sien, Robespierre. Elle avait à sa tête des hommes qui jouissaient d’une extrême popularité dans la basse classe :