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RÉVOLUTION FRANÇAISE.

sociétés affiliées, « faire entendre le cri de douleur qui retentissait dans toutes les parties de la république ; la voix des patriotes opprimés, plongés dans les cachots, d’où l’aristocratie venait de sortir. »

La convention, loin d’adhérer au vœu des Jacobins, leur interdit, pour ruiner leur influence, les pétitions collectives, les affiliations, les correspondances de la société-mère avec les autres sociétés, et désorganisa de cette manière la fameuse confédération des clubs. Les Jacobins, repoussés de la convention, s’agitèrent dans Paris où ils étaient encore les maîtres. Ce fut alors que les thermidoriens convoquèrent aussi leur peuple, en réclamant l’appui des sections. En même temps Fréron appela les jeunes gens aux armes, dans son journal de l’Orateur du Peuple, et se mit à leur tête. Cette milice nouvelle, irrégulière, se nomma la jeunesse dorée de Fréron. Ceux qui la composaient appartenaient tous à la classe riche et moyenne ; ils avaient adopté un costume particulier qu’on appelait costume à la victime. Au lieu de la carmagnole des Jacobins, ils portaient l’habit carré et décolleté, ils avaient des souliers très découverts, les cheveux pendants sur les côtés, retroussés par derrière avec des tresses nommées cadenettes ; ils étaient armés de bâtons courts et plombés en forme d’assommoir. Une partie de ces jeunes gens et des sectionnaires était royaliste ; l’autre suivait l’impulsion du moment, qui était anti-révolutionnaire. Celle-ci agissait sans but et sans ambition, se prononçant pour le parti le plus fort, dans une occasion surtout où le parti le plus fort promettait, par son triomphe, le retour de l’ordre, dont le besoin était général. L’autre combattait sous les thermidoriens contre les anciens comités, comme les thermidoriens avaient combattu sous les anciens comités contre Robespierre ; elle attendait l’instant d’agir pour son propre compte, ce qui arriva après la chute entière du parti révolutionnaire. Dans la situation violente où se trouvaient les deux partis, avec des craintes ou des ressentiments, ils se poursuivaient à outrance et se chargeaient dans les rues, en criant : Vive la convention ! ou Vive la Montagne ! La