Page:Mignet - Histoire de la Révolution française, 1838.djvu/339

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
335
CONVENTION NATIONALE.

ces journées, firent celle de l’an III, étaient à la tête du parti conventionnel. Ce parti n’était ni l’ancienne Gironde, ni l’ancienne Montagne. Neutre jusqu’au 31 mai, assujetti jusqu’au 9 thermidor, il était entré en possession du pouvoir depuis cette époque, parce que la double défaite des Girondins et des Montagnards l’avait laissé le plus fort. C’est à lui que s’étaient réunis les hommes des côtés extrêmes, qui avaient commencé la fusion. Merlin de Douai représentait la partie de cette masse qui avait cédé aux circonstances, Thibaudeau la partie demeurée inactive, et Daunou la partie courageuse. Ce dernier s’était déclaré contre tous les coups d’état depuis l’ouverture de l’assemblée, et contre le 21 janvier, et contre le 31 mai, parce qu’il voulait le régime de la convention, sans les violences et les mesures de parti. Après le 9 thermidor, il blâma l’acharnement déployé contre les chefs du gouvernement révolutionnaire, dont il avait été la victime comme l’un des soixante-treize. Il avait obtenu beaucoup d’ascendant à mesure qu’on avançait vers le régime légal. Son attachement éclairé pour la révolution, sa noble indépendance, la sûreté et l’étendue de ses idées, et son imperturbable constance, le rendirent l’un des acteurs les plus influents de cette époque. Il fut le principal auteur de la constitution de l’an III, et la convention le chargea, avec quelques autres de ses membres, de la défense de la république, dans la crise de vendémiaire.

La réaction continuait de plus en plus ; elle était indirectement favorisée par les membres de la droite, qui, depuis le début de cette assemblée, n’avaient été qu’accidentellement républicains. Ils n’étaient pas disposés à repousser les attaques des royalistes avec la même énergie que celle des révolutionnaires. De ce nombre étaient Boissy-d’Anglas, Lanjuinais, Henri La Rivière, Saladin, Aubry, etc. ; ils formaient dans l’assemblée le noyau du parti sectionnaire. D’anciens et de fougueux Montagnards, tels que Rovère, Bourdon de l’Oise, etc., entraînés par le mouvement contre-révolutionnaire, laissaient prolonger la réaction, sans doute pour faire leur paix avec ceux qu’ils avaient si violemment combattus.