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CONSULAT.

ministres. Mais il était incapable de gouverner lui-même ; le pouvoir était dirigé par le conseil d’état, exercé par le ministère.

La législature s’éloignait de la forme établie jusque-là : elle cessait d’être une assemblée délibérante, pour devenir une cour judiciaire. C’était devant elle que le conseil d’état, au nom du gouvernement, et le tribunat, au nom du peuple, plaidaient leurs projets respectifs. Sa sentence était la loi. Sièyes, à ce qu’il semble, avait pour but d’arrêter les usurpations violentes des partis, et, tout en plaçant la souveraineté dans le peuple, de lui trouver des limites en elle-même : cette intention ressort du jeu compliqué de sa machine politique. Les assemblées primaires, composées du dixième de la population générale, nommaient la liste communale de candidature. Des collèges d’électeurs, également nommés par elles, choisissaient dans la liste communale la liste supérieure des candidats provinciaux, et dans la liste provinciale la liste des candidats nationaux. En tout ce qui concernait le gouvernement, il y avait un contrôle réciproque. Le proclamateur-électeur prenait ses fonctionnaires parmi les candidats présentés par le peuple ; et le peuple pouvait destituer les fonctionnaires, en ne les maintenant pas sur les listes de candidature, qui étaient renouvelées, la première tous les deux ans, la seconde tous les cinq ans, la troisième tous les dix ans. Mais le proclamateur-électeur n’intervenait point dans la nomination des tribuns et des législateurs, dont les attributions étaient purement populaires.

Cependant, pour placer un contre-poids dans le sein de cette autorité même, Sièyes séparait l’initiative et la discussion de la loi, qui résidaient dans le tribunat, de son adoption, qui appartenait à l’assemblée législative. Mais, outre ces prérogatives différentes, le corps législatif et le tribunal n’étaient point élus de la même manière. Le tribunat se composait de droit des cent premiers membres de la liste nationale, tandis que le corps législatif était directement choisi par les colléges électoraux. Les tribuns devant être plus actifs, plus bruyants, plus populaires, étaient nommés à vie, et par un procédé plein