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EMPIRE.

Depuis longtemps le Portugal était une véritable colonie anglaise. L’empereur, d’accord avec les Bourbons de Madrid, décida, par le traité de Fontainebleau du 27 octobre 1807, que la maison de Bragance avait cessé de régner. Une armée française, sous les ordres de Junot, entra dans le Portugal. Le prince régent s’embarqua pour le Brésil, et les Français occupèrent Lisbonne le 30 novembre 1807. Cette invasion ne fut qu’un acheminement à celle de l’Espagne. La famille royale était dans la plus grande anarchie : le favori Godoï était maudit par le peuple, et le prince des Asturies, Ferdinand, conspirait contre le pouvoir du favori de son père. Quoique l’empereur ne dût pas craindre beaucoup un pareil gouvernement, il avait été alarmé d’un armement maladroit fait par Godoï, lors de la guerre de Prusse. C’est sans doute à cette époque qu’il projeta de mettre un de ses frères sur le trône d’Espagne ; il crut abattre facilement une famille divisée, une monarchie mourante, et obtenir l’assentiment d’un peuple qu’il rappellerait à la civilisation. Sous le prétexte de la guerre maritime et du blocus, ses troupes pénétrèrent dans la Péninsule, occupèrent ses côtes, ses principales places et se postèrent près de Madrid. On insinua alors à la famille royale de se retirer dans le Mexique, à l’exemple de la maison de Bragance. Mais le peuple se souleva contre ce départ : Godoï, objet de la haine publique, courut les plus grands risques pour sa vie ; et le prince des Asturies fut proclamé roi, sous le nom de Ferdinand VII. L’empereur profita de cette révolution de cour pour opérer la sienne. Les Français entrèrent dans Madrid, et il se rendit lui-même à Bayonne, où il appela les princes espagnols. Ferdinand restitua la couronne à son père, qui s’en démit à son tour en faveur de Napoléon ; celui-ci la fit décerner à son frère Joseph par une junte suprême, par le conseil de Castille et la municipalité de Madrid. Ferdinand fut mis au château de Valençay, et Charles IV vint habiter Compiègne. Napoléon appela son beau-frère Murat, grand-duc de Berg, au trône de Naples, en remplacement de Joseph.

À cette époque commença la première opposition contre la