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HISTOIRE DE LA RESTAURATION.

contrastait avec l’enthousiasme des partisans de la maison de Bourbon. Souvent le cri Vive la garde ! couvrit celui de Vive le roi ! et un grand nombre de spectateurs n’emportèrent de cette solennité que de douloureux pressentiments. Les alarmes furent bientôt augmentées par la formation du ministère, où l’on compta plusieurs hommes étrangers à l’esprit de la révolution, et que des services antérieurs à 1789, ou seulement la faveur du monarque, désignaient à son choix. De ce nombre étaient M. Dambray, chancelier de France et garde-des-sceaux ; M. l’abbé de Montesquiou, ministre de l’intérieur ; et M. le comte de Blacas, ministre de la maison du roi : le général Dupont, tristement célèbre par la capitulation de Baylen, eut le portefeuille de la guerre ; M. de Talleyrand fut ministre des affaires étrangères ; M. Malouet eut le département de la marine ; le baron Louis celui de finances, et M. Beugnot, la direction de la police du royaume. D’actives négociations pour la paix furent entamées ; la glorieuse mais indécise bataille livrée par le maréchal Soult, avec des forces très inférieures, contre le duc de Wellington, sous les murs de Toulouse, n’apporta aucun changement à l’état général des affaires, et, le 30 mai, la paix définitive fut conclue entre la France et les puissances alliées, par le traité de Paris. La France rentrait dans ses anciennes limites, elle conservait Avignon, le comtat Venaissin, Mulhausen, et rendait aux alliés cinquante-trois forteresses encore occupées par nos troupes, avec tout le matériel qu’elles renfermaient : l’Angleterre saisissait trois de nos colonies, l’Île de France, Sainte-Lucie et Tabago ; nous demeurions en possession de l’île Bourbon, de la Guiane, de Pondichéry, de la Guadeloupe et de la Martinique. Peu après la signature de ce traité, le territoire français fut délivré des troupes étrangères.

Le roi convoqua, pour le 4 juin, les sénateurs et le corps législatif violemment dissous par Napoléon, et, le même jour, en leur présence, il donna solennellement aux Français une charte constitutionnelle, dont les dispositions principales reproduisaient celles de l’acte du sénat et de la déclaration de