Page:Mignet - Histoire de la Révolution française, 1838.djvu/478

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
474
HISTOIRE DE LA RESTAURATION.

imposés par les alliés à la France. Leurs demandes furent réduites à cinq points : 1° la cession du territoire comprenant les places de Philippeville, Mariembourg, Sar-Louis et Landau ; 2° la démolition des fortifications d’Huningue ; 3° le paiement d’une indemnité de sept cents millions, sans préjudice des créances dues par le gouvernement français envers les particuliers de tous les états de l’Europe ; 4° la restitution du département du Mont-Blanc au roi de Sardaigne ; 5° l’occupation, pendant trois ou cinq ans, à la volonté des alliés, d’une ligne le long des frontières, par une armée de cent cinquante mille hommes entretenue aux frais de la France. Ce douloureux traité fut signé le 20 novembre 1815.

L’insolente tyrannie et les cruelles exigences d’un million d’étrangers ne sont pas les seuls maux que la France eut à souffrir par suite des événements désastreux des cent jours. Plusieurs départements du Midi furent longtemps en proie à la guerre civile et à une sanglante anarchie ; d’horribles assassinats y signalèrent cette époque fatale : après la journée de Waterloo, des compagnies franches assaillirent Marseille, s’y livrèrent à de furieux excès, et massacrèrent un corps de mameluks qui tenait garnison dans ses murs ; une populace féroce égorgea le maréchal Brune à Avignon ; le brave général Ramel périt assassiné à Toulouse : dans le département du Gard, la réaction royaliste se manifesta sous l’apparence du fanatisme religieux ; à Nîmes, à Uzès et autres lieux, des assassins parcoururent les rues en plein jour, au cri de Meurent les protestants ! Des monstres, conduits par un Trestaillon, un Truphémi, un Graffan, renouvellent les horreurs du 2 septembre ; ils massacrent les calvinistes jusque dans les prisons, avec les raffinements de la plus horrible barbarie, outragent leurs femmes, brûlent leurs maisons et leurs temples ; et ces atrocités sont impunies ! elles se commettent à la vue des autorités locales qui laissent faire ; le gouvernement, impuissant à les prévenir, garde longtemps le silence, et la chambre de 1815 se voue à la flétrissure en rappelant à l’ordre, avec des transports frénétiques, le député d’Argen-