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HISTOIRE DE LA RESTAURATION.

Tandis que le midi de l’Europe s’agite, une active fermentation remue la Prusse et les états du nord de l’Allemagne, qui attendent en vain les institutions libérales que leurs princes leur ont promises. Il se forme quatorze cercles redoutables d’associations secrètes : c’est au nom de la liberté et de l’égalité que leurs membres s’unissent, c’est une révolution politique et sociale qu’ils demandent. Un enthousiasme démagogique enflamme les universités. Le poëte Kotzebuë, défenseur, dans ses écrits, des droits des monarques, était tombé sous le poignard du jeune Charles Sand, l’un des héros de l’indépendance allemande ; des milliers de voix répétaient avec transport le nom de l’assassin, des milliers de cœurs vouaient un culte à sa mémoire. La fièvre révolutionnaire qui travaillait le continent minait sourdement l’Angleterre, et menaçait d’y livrer le corps social à une longue et douloureuse agonie. Cette agitation convulsive s’étendait avec rapidité vers l’Orient, et tirait de leur repos léthargique les descendants des héroïques Hellènes : le génie des Miltiade et des Thémistocle se réveillait dans leurs cités en ruine, après un sommeil de deux mille ans, et le cri de patrie et de liberté, en partant des murs de Souli et des rochers de l’Épire, ébranlait déjà les échos de Marathon et de Salamine.