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RÈGNE DE LOUIS XVIII.

l’éclat de sa renommée : il obtint son renvoi, et par ce coup violent, hâta sa propre chute ; un certain nombre de députés influents, amis du ministre disgracié, et qui se disaient dévoués à la charte comme au roi, se jetèrent dans l’opposition, et formèrent le noyau d’un nouveau parti constitutionnel-royaliste, que les partisans de l’absolutisme désignèrent sous le nom de parti de la défection. Le Journal des Débats fut le puissant organe de cette fraction de la chambre, et commença aussitôt contre le cabinet une polémique ardente et implacable.

La fin du ministère de M. de Châteaubriand avait été honorablement marquée par la conduite habile et courageuse de M. Hyde de Neuville, ambassadeur à Lisbonne, à la suite d’une émeute contre-révolutionnaire. Le 30 avril, l’infant don Miguel, soutenu par la reine-mère, s’était mis dans cette capitale à la tête des troupes, et retenait son père prisonnier dans son propre palais. Il avait fait jeter dans les prisons plusieurs ministres, et un grand nombre de personnages éminents, annonçant hautement l’intention de rétablir l’autorité royale dans ses anciennes prérogatives. M. Hyde de Neuville s’entendit alors avec l’ambassadeur d’Angleterre, et, de concert avec lui, il entraîna Jean VI sur un vaisseau anglais mouillé dans le Tage, et d’où le roi, libre sous la protection du pavillon britannique, réussit à soumettre les séditieux et à ressaisir le pouvoir. Don Miguel fut admis à repentance et éloigné du Portugal, tandis que, d’après l’avis de l’ambassadeur anglais, Jean VI, mal affermi sur son trône, demanda des secours à l’Angleterre, en invoquant le casus fœderis. Six mille Hanovriens reçurent aussitôt l’ordre de se tenir prêts à passer en Portugal. M. Hyde de Neuville encourut, par sa conduite, la censure du parti royaliste, qui accueillit don Miguel en France, et lui fit fête. Les chefs de ce parti entraînaient malgré lui le ministère dans une voie destructive des droits acquis et des nouveaux intérêts de la nation. La presse libérale signalait avec force cette tendance funeste, en la flétrissant, tandis que les journaux de la contre-opposition, et surtout la Quotidienne, accusaient amèrement la lenteur du gouvernement à