Page:Mignet - Histoire de la Révolution française, 1838.djvu/92

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
88
RÉVOLUTION FRANÇAISE.

deaux, de Toulouse, s’élevèrent contre les opérations de l’assemblée, qui supprima les chambres de vacations, abolit les ordres, et déclara incompétentes les commissions des états. Les partisans de l’ancien régime saisissaient tous les moyens de l’inquiéter dans sa marche : la noblesse excitait les provinces, les parlements prenaient des arrêtés, le clergé faisait des mandements, et les écrivains profitaient de la liberté de la presse pour attaquer la révolution. Ses deux principaux ennemis furent les nobles et les évêques. Le parlement, n’ayant pas de racine dans la nation, ne formait qu’une magistrature dont on prévenait les attaques en la détruisant ; au lieu que la noblesse et le clergé avaient des moyens d’action qui survivaient à leur influence de corps. Les malheurs de ces deux classes furent causés par elles-mêmes : après avoir harcelé la révolution dans l’assemblée, elles l’attaquèrent plus tard à force ouverte, le clergé par des soulèvements intérieurs, la noblesse en armant l’Europe contre elle. Ils espérèrent beaucoup de l’anarchie, qui causa, il est vrai, de grands maux à la France, mais qui fut loin de rendre leur propre situation meilleure. Voyons comment furent amenées les hostilités du clergé, et pour cela reprenons les choses de plus haut.

La révolution avait commencé par les finances, et n’avait pas pu faire cesser encore les embarras qui l’avaient produite. De plus importants objets avaient occupé les moments de l’assemblée. Appelée, non plus à soudoyer l’administration, mais à constituer l’état, elle avait de temps en temps suspendu ses discussions législatives pour satisfaire aux besoins les plus pressants du trésor. Necker avait proposé des moyens provisoires, qui avaient été adoptés de confiance, et presque sans discussion. Malgré cet empressement, il ne voyait pas sans humeur les finances subordonnées à la constitution, et le ministère à l’assemblée. Un premier emprunt de trente millions, décrété le 9 août, n’avait pas réussi ; un emprunt postérieur de quatre-vingts millions, décrété le 27 du même mois, avait été insuffisant. Les impôts étaient réduits ou abolis, et ils ne produisaient presque rien à cause de la difficulté de leur per-