Page:Mikhaël-Lazare - La Fiancée de Corinthe, 1888.djvu/47

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étranger pour vous, je passerai la nuit près de l’autel et j’attendrai l’aurore.

(Il s’assied sur le banc.)
Ménœchos

C’est bien. Il sied aux jeunes gens de respecter les daïmones du foyer.

(Il sort.)

Scène V

MANTICLÈS, se lève et s’avance vers la haie.
Manticlès

La déesse au manteau d’argent fait errer ses baisers sur le jardin embaumé de chèvrefeuilles et les arbres paraissent pâles d’amour. Jadis, en des soirs adorables, je marchais avec Apollonia sous les ramures en fleurs et il me semble qu’elle va paraître et glisser paisiblement dans les allées silencieuses. Mais je ne sais pourquoi, dans l’amicale paix de la nuit une étrange crainte m’oppresse. Là-bas, les oliviers des collines sont pareils à des fantômes ; la brise bruit dans les feuillages et j’ai cru surprendre un sanglot. Souvent, bien souvent, cette terreur inexplicable m’a saisi. Elle sort sans doute des choses et tout semble tressaillir d’effroi dans l’attente des jours nouveaux. Le souvenir me revient de cette soirée où j’écoutais un pilote revenu des pays lointains. C’était sur les côtes de l’Asie mystérieuse et l’homme racontait : Un jour, sur la mer tyrrhénienne, dans les airs brusque-