Page:Milton - Cheadle - Voyage de l’Atlantique au Pacifique.djvu/15

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aimable des sourires. Il nous accosta de la façon la plus gracieuse et la plus insinuante, en faisant une remarque sur la chaleur de cette journée. L’ouverture ainsi faite, il s’en servit adroitement et quelques minutes lui suffirent pour se mettre à notre égard sur un pied d’intimité. Il regrettait infiniment de n’avoir pas sur lui une de ses cartes, et pour y suppléer il nous fit lire l’inscription « capitaine — du —, » qui était gravée sur la monture en argent de sa canne. Sans nous demander d’ailleurs qui nous étions, il nous pria de lui faire l’honneur de visiter sa charmante petite résidence, où, l’hiver suivant, nous ne manquerions pas de bonnes occasions pour tirer des coqs. Ce capitaine plein d’urbanité voulut absolument nous faire prendre quelques rafraichissements et, au comptoir du café, il nous présenta, avec beaucoup de cérémonie, un homme grand et angulaire, sous le titre du major un tel, des carabiniers canadiens.

Le major était en petite tenue ; ses habits fort râpés étaient trop étroits et trop courts pour lui et, comme Bardolph, il portait « à la poupe une lanterne, » dont l’éclat brillait au milieu du rouge plus sombre qui formait le ton général de sa personne. Il avait des façons assez ténébreuses, mais qui ne manquaient pas de solennité, et son maintien était si digne que nous perdîmes en le regardant toute l’envie de rire qu’il avait pu nous donner au premier abord. Nous le saluâmes tous les trois et lui serrâmes la main avec une politesse qui était presque au niveau de celle que montrait notre ami le capitaine.

Nos nouvelles connaissances découvrirent qu’elles se rendaient au même endroit que nous et nous honorèrent assidument de leur compagnie jusqu’à notre arrivée à Clifton-house.

Après avoir admiré les chutes, nous revînmes diner, et alors le capitaine et le major rivalisèrent à qui nous conterait les histoires les plus extraordinaires.