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DE L’ATLANTIQUB


gain ou perte, est noté par une entaille sur un bAlon : chaque entaille représente un enjeu.

Ce jeu dura toute la moitié du jour, avec une énergie, avec un inté_t qui ne faisait défaut _ personne, ni aux joueurs ni aUl speebteurs. Seul Cheadle se fatiguait du tintamarre et de la monotonie de cette récréation. Enfin le Chasseur gagna aux autres tout ce qu’ils avaient, excepté leurs fusils et leurs couteaux ; cependant les visiteurs se retirèrent sans avoir l’air le moins du monde abattu par leur mauvaise fortune.

Derrière eux restèrent un Indien et sa squau. La taille de l’homme 6tait gigantesque, plus de six pieds ; l_s os de sa forte charpente ressortaient à tous les angles et _ tous les joints, et ses muscles pouvaient faire l’objet d’une 6tude, tant le défaut de graisse les faisait appara1tre. Son asp_ct était hideux. Sur sa face. il avait un grand nez parfaitement aplati ; à la place d’un de ses yeux, une emplâtre graisseuse et noire ; sur ses gencives vides,. deux longues canines. Il avait été ainsi d_figur6 en se battant avec un ours gris qui, d’un coup de patte, lui avait arraché un œil, 6crasé le nez et fait sauter les dents. Il paraissait dans un état d’absolue misère. LiU6ralement, il avait perdu aDjeu tout ce qu’il possédait, hormis sa femme, son enfant et un chien eIDanqu6. Pour se protéger contre un froid de 25 degrés audessous de zéro et le vent du nord qui soufflait avec force, il ne leur restait que des lambeaux de oouverture. À eux tous, ils n’avaient pas une bouchée _ manger. L’homme était sans fusil, sans munition, sans couteau, sans raquette ; il ne lui restait rien de ce qui est n6cessaire au chasseur.

Deux jours durant, ce pauvre diable resta au bivouac de

Cheadle, mangeant du matin au soir. Jamais ses gencives édentées ne se reposaient. Il consommait non-seulement tout ce qu’on lui donnait, mais il s’attribuait tranquillement tous les rebut !’ qu’on faisait dégeler au feu pour le8 chiens.

Néanmoins lorsque, deux jours plus tard, nous reprtmes la