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Page:Milton - Cheadle - Voyage de l’Atlantique au Pacifique.djvu/342

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assurèrent qu’il serait impossible de conduire des chevaux à William’s Creek, à cause de la neige qui avait commencé à tomber avant leur départ des mines. Nous prîmes donc des places dans la diligence qui allait de Lilloet à Soda Creek, sur le Fraser, à 175 milles de distance. Un bateau à vapeur navigue de Soda Creek à la bouche de la Quesnelle, pendant une soixantaine de milles, et, de là, un chemin de mulet conduit à Richfield, dans William’s Creek, au centre des mines du Caribou. La diligence consistait en un léger wagon ouvert et portait, outre nous et un autre voyageur, environ une tonne de chargement. Elle était attelée de cinq chevaux, deux au timon et trois en tête. Le premier jour, nous allâmes rondement. Le conducteur Johnny était un fameux cocher, un véritable personnage. C’était un Yankee pur sang. Son chapeau californien de feutre dur, avec sa forme basse et ses immenses bords, lui donnait à nos yeux une apparence ridicule. Comme tous ceux de sa race, il était ennemi du repos ; toujours occupé, il parlait à nous ou à ses chevaux, chiquait, crachait, fumait ou buvait ; toujours prêt à faire des largesses, il buvait, dans chaque maison, deux ou trois coups avec tous les assistants. En somme, Johnny était un brave garçon, malgré tout. Nous devons constater que, d’après son témoignage, il suivait ordinairement le système d’abstinence complète et qu’il ne buvait que de temps à autre, pour changer ; mais alors il buvait à cœur joie[1]. Il se trouvait dans une de ces rares périodes à l’époque où nous l’avons connu.

Ici, la route, unie et bien faite, a souvent dix-huit pieds de large. Elle passe le Fraser au moyen d’un bac, à quelque distance de Lilloet ; puis elle remonte la vallée du Fraser pendant une vingtaine de milles, en tournoyant par-dessus les flancs escarpés des hauteurs. À la vallée Pavillon, elle prend vers le

  1. C’est le même caractère que celui du métis français, la Ronde, et de la plupart de ses semblables. Voyez au chapitre iii. (Trad.)