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saises, envoyées par l’entremise de lord Selkirk. Elle atteignit, en 1812, le pays concédé, et reçut des renforts successivement jusqu’à l’année 1815. Jamais ceux qui, les premiers, s’établirent dans un nouveau pays, n’ont été soumis à de plus dures épreuves, n’ont eu de plus réels motifs de découragement. Les sept ou huit années qui suivirent leur première arrivée furent des plus rudes. D’abord, les employés canadiens ou métis de la Compagnie des fourrures du Nord-Ouest, les considérant comme les protégés de leur rivale la Compagnie de la baie de Hudson, les attaquèrent et les forcèrent de se mettre en sûreté à Pembina. Ils y passèrent l’hiver, vivant des charités que leur faisaient les Indiens et les métis. La rareté des provisions leur fit endurer bien des maux ; mais ils souffrirent aussi beaucoup de ce qu’ils n’avaient pas les moyens suffisants pour se garantir contre les rigueurs du climat. Les gens du Nord-Ouest les attaquèrent encore après leur retour dans l’établissement. Plusieurs des colons furent tués ; le reste fut rejeté en exil, et leurs demeures furent pillées et détruites. La troisième fois qu’ils revinrent, la mauvaise fortune sembla s’acharner à détruire les récoltes qu’ils s’efforçaient de produire pour soutenir leur existence. Par exemple, et deux ans de suite, des sauterelles dévorèrent les récoltes qui semblaient près de leur rendre au centuple les frais qu’elles avaient coûtés. À peine si les colons purent sauver une petite quantité de semailles que les femmes récoltèrent dans leurs tabliers. Ces insectes arrivaient comme des armées. Ils formaient des monceaux par terre. Ils éteignaient par leur nombre les feux qu’on allumait au dehors. Ils empestèrent le terrain, ils empoisonnèrent les eaux par la masse de leurs cadavres en putréfaction. Les sauterelles ont disparu ; du moins, depuis lors, on ne les a pas revues dans la colonie ; mais, à leur place, sont arrivés des myriades de merles, et les récoltes ne s’en sont point mieux trouvées. Enfin, ce n’est guère qu’à partir de 1821, neuf ans après le premier établissement de la colonie,