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de la colonie de la Rivière Rouge. Il faut bien, jusqu’à un certain point, en faire remonter la responsabilité à la nonchalance incorrigible et au défaut d’économie qui caractérisent les Canadiens français et leurs parents les métis français. Or ce sont eux qui en grande partie forment la population de la colonie. Les plus nombreux même sont les métis français, qui malheureusement, sont justement les membres sur lesquels la communauté peut faire le moins de fond et qui en sont les moins productifs. Inconstants, légers, emportés, passionnés pour la toilette et pour le plaisir, ils ont un invincible dégoût de tout travail utile. Aussi est-il fort rare de voir quelques-uns d’eux s’élever à une position assurée d’aisance et de bien-être.

M. Ross, dans son Histoire de la colonie de la Rivière Rouge, en a dessiné de main de maître un portrait que nous demandons la permission de reproduire ici. « Les Canadiens et les métis, dit-il, ont mêlé leurs établissements et se ressemblent fort par leur genre de vie. À proprement parler, ils ne sont ni fermiers, ni chasseurs, ni pêcheurs, mais ils se livrent à ces trois occupations à la fois, suivant leurs caprices ou les circonstances. Ils cultivent aujourd’hui ; demain ils chasseront et, le surlendemain, ils pêcheront : le tout sans projet arrêté, généralement sans profit, mais sans se laisser déconcerter. Ils ont beaucoup de goût pour les aventures et fort peu pour le travail régulier. Ils mettent un grand agrément dans les relations ; néanmoins ils sont plus souvent utiles à eux-mêmes qu’à autrui ; ils soignent leurs intérêts autant qu’ils le peuvent sans grand parti pris, ni réflexion. En somme, ils sont heureux. » Une grande partie de leur temps se passe à chanter, à danser et à causer de maison en maison. Ils se grisent quand ils en ont l’occasion. C’est une race gaie, légère, obligeante, généreuse jusqu’à l’insouciance, hospitalière et extravagante. Le bal pour eux commence tous les soirs, durant l’hiver. Une noce se célèbre à table ouverte. Les violons se succèdent alors sans relâche au service des danseurs pendant la nuit entière, ce