Page:Milton - Samson agoniste, 1860, trad. Avenel.djvu/46

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vents font enfin leur paix avec les mers, les mers avec leurs rivages ; mais toi, ton courroux implacable ne cesse de gronder, éternelle tempête que rien ne calmera. Mais alors pourquoi m’humilier ainsi, implorer la paix pour ne recueillir que le dédain et la haine, me voir repousser avec des prophéties sinistres et le stigmate de l’infamie que l’on présage à mon nom ; désormais, je renonce à me mêler de tes actions et aussi à jeter sur les miennes un blâme trop sévère. Si elle n’a deux visages, la renommée a deux bouches, et le plus souvent c’est avec des rumeurs contradictoires qu’elle publie nos actions. Sur ses deux ailes, l’une noire, l’autre blanche, elle porte les plus grands noms dans sa fuite éternelle. Peut-être parmi les circoncis, à Dan, en Juda et chez les tribus voisines, mon nom, tenu pour infâme, ne sera-t-il prononcé qu’avec des malédictions, flétri comme le symbole des perfidies conjugales ; mais dans ma patrie, dont le suffrage m’est le plus cher, à Ecron, à Gaza, à Asdod et Gad, exaltée dans les fêtes solennelles, célébrée pendant ma vie et après ma mort, je verrai mon nom mêlé aux noms des plus illustres femmes. Pour sauver d’un ennemi farouche ma patrie désolée, n’est-ce pas moi qui sus briser et fouler sous mes pieds les liens du mariage ? tous les ans, mon tombeau recevra des parfums et des fleurs ; je serai entourée de gloire comme sur le mont Ephraïm Jaël, qui dans sa fourbe inhospitalière, frappant Sisara endormi, plongea un clou dans sa tempe. À recevoir ces marques d’honneur, ces récompenses accordées au dévoûment que, dans l’opinion générale, je té-