Page:Milton - Samson agoniste, 1860, trad. Avenel.djvu/80

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nous n’avons pas beaucoup plus de raison de nous lamenter maintenant. Samson s’est acquitté de ce qu’il se devait à lui-même ; il a, comme il convenait à Samson, terminé héroïquement une vie héroïque. Vengé pleinement de ses ennemis, il a, sur tout le territoire des Philistins, laissé des années de deuil et de pleurs aux enfants de Kaphtor. A Israël il a laissé l’honneur et la liberté, pourvu qu’Israël trouve en lui le courage de tirer profit de ces instants propices ; il a laissé à lui-même et à la maison de son père une renommée éternelle, et, ce qu’il y a de meilleur et de plus heureux, il a fait tout cela avec l’aide de Dieu, qui ne l’avait point abandonné comme nous le craignions, mais qui l’a favorisé et assisté jusqu’à la fin. Non, il n’est rien ici pour les pleurs, rien pour nous lamenter et nous frapper la poitrine, rien de faible, rien de bas, rien de honteux et de coupable, rien qui ne soit beau dans une mort si noble, rien que ce qui peut nous apporter le calme.

Allons chercher son corps là où il repose, trempé dans le sang de ses ennemis. Pour laver le sang qui s’est figé sur ses plaies, apportons les herbes odorantes et l’eau pure de la source ; quant à moi, je vais en hâte (Gaza, en effet, ne saurait nous opposer un refus) chercher tous mes parents et tous mes amis pour l’emporter loin d’ici, et accompagner silencieusement son funèbre convoi jusqu’à la maison de son père ; là je lui élèverai un tombeau, et, pour le couvrir d’une ombre glorieuse, j’y planterai le laurier toujours vert et le palmier au vaste ombrage ; j’y suspendrai ses trophées.