Page:Mirbeau - L’Abbé Jules, éd. 22, Ollendorff.djvu/165

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que ses membres las réclamaient un peu de repos, il s’assit sur une poutre abattue, non loin du pavillon qu’habitait le Père Pamphile, et il continua de rêver. En face de lui, était un tas de gravats éboulés récemment, car les fragments de brique qui les parsemaient, montraient, à leur cassure, un rouge plus vif et brillant. Des solives écrasées, des planches rompues, dardaient entre les moellons, les briques et les pierres, de longues pointes échardées. Jules ne prêta d’abord à ces débris d’autre attention que celle, très attristée, d’ailleurs, qu’il accordait à tous les débris de ce genre dont les cours du couvent étaient pleines ; et, malgré ses désirs de mort, jugeant l’endroit dangereux, il allait chercher un refuge loin des bâtiments. Mais bientôt, il remarqua, dépassant les gravats d’une vingtaine de centimètres, un sabot. Et ce sabot se dressait en l’air, immobile au bout d’une chose ronde noire, gonflée, luisante d’exsudations verdâtres. Autour du sabot voletaient des mouches, des myriades de mouches, dont le ronflement sonore emplit les oreilles de l’abbé d’un bruit d’orgues, monotone et prolongé. En même temps, une puanteur lui arriva aux narines, la puanteur âcre et fade qui s’exhale des chairs corrompues, et des bêtes crevées.

— Mais, c’est le Père Pamphile ! s’écria-t-il.

Et, se relevant d’un bond, il appela comme si quelqu’un pouvait l’entendre en cette solitude morne.

— Au secours !… Au secours !… Par ici !… Au secours !