Page:Mirbeau - L’Abbé Jules, éd. 22, Ollendorff.djvu/283

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— On m’a dit que monsieur le vicaire mariait sa sœur aujourd’hui, aux confins du département.

Le bedeau tendit à mon oncle son camail, et d’un air d’intérêt et de protection, tout ensemble, il ajouta :

— Je remarque que monsieur l’abbé paraît bien souffrant… mais Frélotte, c’est une promenade.

Mon oncle grogna :

— Une promenade !… Vous oubliez le manipule, Baptiste.

— En ces circonstances, l’officiant ne revêt jamais le manipule… Monsieur l’abbé peut vérifier dans son rituel.

Après avoir dit cela d’un ton de reproche un peu scandalisé, il s’esquiva pour allumer les cierges de l’autel.

Mon oncle ne s’attarda point devant le tabernacle, abrégea autant que possible les oremus et les génuflexions, puis, ayant recouvert le ciboire de son pavillon à franges dorées, il redescendit. Nous partîmes. Le bedeau marchait devant, tenant, d’une main, la boîte aux saintes huiles, de l’autre, une tintenelle ; je venais ensuite, portant la lanterne ; mon oncle nous suivait, haletant, souffrant, très embarrassé du ciboire qu’il levait, baissait, inclinait à droite, puis à gauche, cherchant une position commode, qui lui permît de mieux respirer.

— Pas si vite ! cria-t-il, lorsque nous débouchâmes sur l’allée d’ormes qui reliait l’église au pays !…

Tous les vingt pas le bedeau agitait sa tintenelle qui