Page:Mirbeau - Le Journal d’une femme de chambre.djvu/151

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— C’est une indignité… une honte.

— Et si vous n’avez pas la clé de cet écrin, eh bien, on le forcera.

Exaspérée, Madame cria :

— Vous n’avez pas le droit… Je me plaindrai à l’ambassade… aux ministres… je me plaindrai au Roi, qui est de nos amis… Je vous ferai révoquer, entendez-vous… condamner, mettre en prison…

Mais ces paroles de colère ne produisaient aucun effet sur l’impassible douanier, qui répéta avec plus d’autorité :

— Ouvrez l’écrin…

Madame était devenue toute pâle et se tordait les mains.

— Non ! fit-elle, je ne l’ouvrirai pas… Je ne veux pas… je ne peux pas l’ouvrir…

Et, pour la dixième fois au moins, l’entêté douanier commanda :

— Ouvrez l’écrin !

Cette discussion avait interrompu les opérations de la douane et groupé, autour de nous, quelques voyageurs curieux… Moi-même, j’étais prodigieusement intéressée par les péripéties de ce petit drame et, surtout, par le mystère de cet écrin que je ne connaissais pas, que je n’avais jamais vu chez Madame, et qui, certainement, avait été introduit dans la malle, à mon insu.

Brusquement, Madame changea de tactique, se fit plus douce, presque caressante avec l’incorrup-