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révolutionnaires, et ne s’occupait nullement de politique. Un jour, deux dames lui rendirent visite, sur lettres de recommandation. De Saint-Pétersbourg, où elles étudiaient la médecine, on les avait envoyées dans la Russie centrale, pour cause de suspicion politique. Voulant continuer leurs études, elles prièrent le jeune médecin de leur donner l’enseignement de son art, et de leur permettre l’accès de sa bibliothèque, ce qu’il leur accorda, car il les avait jugées intelligentes et charmantes.

« Les visites fréquentes des deux dames à la maison du docteur éveillèrent les soupçons de la police, qui fit une enquête et découvrit que l’une d’elles manquait de passe-port. Le 10 mai 1879, les deux dames et le jeune médecin furent arrêtés et envoyés en Sibérie « par voie administrative ».

« M. Belloj fut relégué dans les contrées arctiques, au village de Werkhojansk, dans la province de Iakust, où les survivants de l’expédition de la Jeannette l’ont vu en 1882.

« La jeune et belle femme attendait un accouchement, il lui était donc impossible d’accompagner son mari en exil. Mais après la naissance de l’enfant, des parents se chargèrent du petit, et elle commença un voyage de dix mille kilomètres pour retrouver son mari. Elle ne possédait point l’argent nécessaire à cette expédition coûteuse ; elle fut donc obligée de prier le ministre de l’Intérieur de lui permettre d’accom-