Page:Mirbeau - Les Écrivains (première série).djvu/186

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rigueur, mais qu’elle aurait le plus grand tort de se vanter de sa problématique existence, attendu qu’il n’y a là, vraiment, rien de bien beau. Au dire de ces derniers, qui sont de fort savantes gens, les Belges, si tant est qu’ils existent, au sens strictement biologique du mot, ne seraient, à proprement parler, qu’une variété de singes. Ce n’est pas ce qu’on appelle une nation, c’est tout au plus une espèce zoologique, assez curieuse en soi, totalement dépourvue de conscience et de responsabilité morale, et douée du dangereux instinct de l’imitation. Les Belges imitent ce que nous autres, Français, qui avons tout inventé, faisons ou rêvons de faire. Non seulement ils imitent, mais ils contrefont, non seulement ils contrefont, mais ils pré-contrefont. Ils font, si j’ose m’exprimer ainsi, de la contrefaçon préventive. C’est par là que ces animaux — les Belges me pardonnent ce terme scientifique — se montrent réels et redoutables, en tant que singes, et parfaitement irréels et redoutables, en tant qu’hommes.

Aussi, à propos de La Princesse Maleine, qu’avais-je besoin de crier au chef-d’œuvre ? Sans doute La Princesse Maleine est un chef-d’œuvre. Mais pourquoi est-elle un chef-d’œuvre, cette fâcheuse Princesse Maleine, qui semble, au premier abord, nous arriver de Belgique, de cette Belgique idéale qui n’existe probablement pas ? Parce que cinquante jeunes, cent jeunes, tous les jeunes, se disposaient à la concevoir, quand M. Maurice Maeterlinck eut