Page:Mirbeau - Les Vingt et un Jours d’un neurasthénique, 1901.djvu/314

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qui sont de vrais palais… C’est très bien… Je ne suis pas jaloux des soins méticuleux dont on entoure les bêtes… Qu’on les couronne même dans les concours… qu’on les prime… qu’on leur donne des sommes d’argent, dans les comices agricoles, je l’admets… Selon moi, tous les êtres vivants ont droit à de la protection, à autant de bonheur qu’on peut leur en procurer… Mais je voudrais que les enfants – les enfants des hommes – ne fussent pas, comme ils le sont, systématiquement écartés de tous ces bienfaits… bestiophiliques… Eh bien, il paraît que c’est impossible. Un enfant, ça ne compte pour rien… Cette vermine humaine peut crever, et disparaître… Il n’importe… On organise même administrativement, des hécatombes de nouveau-nés… comme si nous étions menacés d’un dangereux pullulement de l’espèce… Et les dirigeants, les maîtres de cette belle société – qui sont, sinon la cause première, du moins les continuateurs indifférents du mal qu’ils dénoncent avec un patriotisme si indigné – se plaignent amèrement du nombre sans cesse décroissant des enfants qu’ils empêchent de naître, ou qu’ils tuent, sitôt nés, par les procédés les plus sûrs et les plus rapides… Car la véritable infanticide, c’est cette société, si terrible aux filles-mères qui ne peuvent nourrir leurs enfants… Il faut la voir adjurer les familles de prolifier tant et plus, ou bien les menacer de peines fiscales très sévères quand elles s’