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Page:Mirbeau - Sébastien Roch, 1890.djvu/172

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concevait pas la brutalité physique ; malgré les bouillonnements de son adolescence, il en ignorait l’âpre et farouche lutte sexuelle.

Alors pourquoi se mêlait-il, à son intimité avec le Père de Kern, de vagues effrois d’un autre amour, d’un impossible et salissant amour, puisque l’amour c’était la femme qui le personnifiait. Pourquoi ne pouvait-il, dans le calme de son cœur, se livrer à lui, tout entier, sans redouter une terrible et décisive catastrophe, que son ignorance ne définissait pas et dont l’avertissait son instinct ? Par quelle déviation cérébrale, au moyen de quel corrupteur pressentiment, cette idée d’un crime insoupçonné, et pourtant inévitable, était-elle entrée en son imagination et s’y cramponnait au point qu’il n’avait plus la force de l’en chasser ? Il se raisonna, se dit qu’il était victime d’une erreur, d’une folie. Rien, dans la conduite du Père, ne justifiait une appréhension pareille. Celui-ci s’était pris d’affection, d’intérêt pour lui ; il dirigeait son esprit dans une voie qu’il avait, longtemps, rêvé de suivre. Fallait-il donc lui en vouloir ? Il le trouvait joli, s’inquiétait de le voir malade. Quel crime à cela ? Était-ce donc défendu de se montrer bon ?… Et pour mieux se rassurer, il se rappela que le Père de Kern avait la réputation d’un prêtre très pieux, presque d’un saint. Il portait un cilice, disait-on, et se flagellait. C’est pourquoi il était si pâle parfois, et que ses yeux, souvent, brillaient d’une étrange flamme mystique, dans un grand cerne de souffrance.

En dépit de ces raisonnements, le doute demeurait, indéracinable. Le lendemain de cette nuit, où le Père lui était apparu, il l’évita pendant les