Page:Mireille Havet Carnaval 1922.djvu/23

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l’air d’une bayadère, en plus on l’étranglera. »

— « Il ne va pas dans les maisons de passe, c’est bon pour vous. Allons, venez me choisir un chapeau tous les deux. »

— « On va nous prendre pour le mari et l’amant, dit Jérôme, trio bien parisien. »

Ils sont dans la rue de Rivoli. Le soleil, on est au printemps, joue avec la beauté de Germaine, la gaîté insolite de Jérôme, la surprise accablée de Daniel. Trio bizarre, « le mari et l’amant », c’est le même, pense Daniel. Ils n’ont pas besoin de moi pour être bien Parisien. Je voudrais être à la campagne, dans un jardin, lire des choses amusantes. Cette femme est stupide, et puis elle a mauvais goût. Germaine lui prend le bras :

— « Tout à l’heure, lui souffle-t-elle à l’oreille, nous serons seuls dans le salon bleu. »


La modiste


Tous ces chapeaux sur leur champignon, que c’est laid. Jérôme et Daniel, soudain camarades dans cet endroit uniquement féminin, font des bêtises de gamin, qui exaspèrent Germaine en train d’essayer.

Elle les appelle comme une maîtresse d’école :

— « Jérôme, Daniel, restez tranquilles et regardez-moi. »

Ils éclatent de rire malhonnêtement devant sa figure sérieuse, comme celle d’une chatte en train de faire ses petites affaires. Germaine finit par rire, offre successivement la moue de son baiser à l’un et à l’autre lorsqu’ils se penchent trop près, sous prétexte de regarder le chapeau, et commande n’importe quoi.

Ils ont l’air, dans la rue, de trois enfants en vacance, tant ils rient et se bousculent. Daniel soudain détendu, n’en veut plus à personne, il