Page:Mireille Havet Carnaval 1922.djvu/30

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— « Oui ?… »

Elle est tellement indifférente, aimable, et banale, que Daniel la retrouve difficilement.

Une robe nouvelle la serre davantage et son corps, moins libre, semble lui-même en cérémonie.

Évidemment, il doit être guéri, car tout cela lui est égal. Il s’amuse même du mauvais goût de ce grand salon, où jamais auparavant elle ne le reçut.

Il se revoit grelottant, sous la fenêtre, pendant les nuits pluvieuses. Elle dormait bien bourgeoisement sans doute, puisque Jérôme est parti.

— « Que je fus sot. »

Pour dîner, malheureusement, elle le ramène dans le petit salon, ce qui compromet beaucoup l’impression de délivrance. Les fleurs y sont encore plus abondantes peut-être et le feu brûle toujours.

Cependant, la fenêtre est entr’ouverte, le vent frais de la nuit gonfle les rideaux souples, on dirait qu’ils recèlent des fantômes ou d’autres fleurs.

Il revoit le divan et cette soirée où… Mais elle a suivi son regard.

— « Vous avez cru vraiment que c’était arrivé ce jour-là, lui dit-elle brutalement, mon pauvre petit, vous ne faisiez que succéder à Jérôme. »

Le visage de Daniel s’empourpre. Qui a dit qu’il était guéri. Ils sont bien les mêmes. Ces semaines d’exil n’ont servi qu’à le rendre plus irritable.

— « À quoi bon revenir, mon petit Daniel, puisque vous avez toujours aussi mauvais caractère. Quand on aime, on ne se laisse pas oublier. Vous avez fait la noce quinze jours ; c’était plus simple qu’avec moi, ça vous a reposé ? Vous avez cependant mauvaise mine. Au fond, vous n’êtes pas intéressant. »