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DU THÉÂTRE EN FRANCE

rature dramatique, d’établir des divisions nettement tranchées, et de donner des définitions exactes, on peut dire que le mystère est la mise en scène d’un fait historique emprunté à l’Ancien ou au Nouveau Testament, comme le miracle est un fait emprunté à la vie d’un saint, et surtout à son martyre[1] ; mais comme dans cet art informe il n’y avait encore aucune règle fixe, les deux genres se confondirent souvent. L’histoire profane et la tradition chevaleresque furent même substituées à l’histoire sainte, ainsi qu’on le voit par le mystère de Griselidis et le mystère de la destruction de Troye.

Exclusivement latin dans l’origine, le mystère donna peu à peu accès à l’idiome vulgaire, et l’on eut de la sorte, sous le nom de farcitures, des pièces moitié latines, moitié françaises, dont on trouve un curieux exemple dans les Vierges sages et les Vierges folles[2]. Il n’offrit d’abord qu’un épisode de la vie du Christ, tel que la Nativité, l’Adoration des Mages, la Résurrection ; mais à la fin du quatorzième siècle on vit paraître pour la première fois, sous le titre de Passion, un poëme embrassant dans tous ses détails la vie de l’Homme-Dieu sur la terre. « À cette époque, dit M. Magnin, on réunit tous les actes de la vie de Jésus-Christ et on en forma une seule et vaste représentation qui ne se joua plus, comme auparavant, le jour de telle ou telle fête, mais qui durait plusieurs jours, souvent plusieurs semaines, et pouvait se répéter pendant tous les temps de l’année. »

Les premiers auteurs de mystères furent, nous l’avons

  1. Voir sur les mystères, Théâtre français au moyen âge, par MM. de Monmerqué et Fr. Michel ; — Études sur les Mystères, par Onésime Leroy, Paris, 1837, in-8o ; — Époques de l’Hist. de France en rapport avec le Théâtre français, par le même, Paris, 1843, in-8o ; — un Mémoire de l’abbé comte de Guasco, dans la collect. Leber, t. XV ; — divers articles de M. Magnin dans le Journal des Savants, principalement dans les années 1846 et 1847 ; — Essai sur la mise en scène depuis les Mystères jusqu’au Cid, par Émile Morice, Paris, 1836, in-12 ; — le Mercure de France, de 1729 ; — Hist. littéraire de la France, t. XX, p. 630. ; — Villemain, Littérature du Moyen Âge, Paris, 1830, in-8o, t. II, 20e leçon. — Les personnes qui voudraient étudier en détail nos anciennes représentations scéniques devront consulter les histoires particulières des villes qui ont été publiées dans ces dernières années.
  2. Voir le texte des Vierges sages et des Vierges folles, dans le Théâtre français au moyen âge, par MM. de Monmerqué et Fr. Michel.