Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 1.djvu/248

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Le mépris suit de près la faveur qu’on rejette.

Marinette

Au moins, en pareil cas, est-ce un bonheur bien doux
Quand on sait qu’on n’a point d’avantage sur vous.
Marinette eut bon nez, quoi qu’on en puisse dire,
De ne permettre rien un soir qu’on vouloit rire.
Quelque autre, sous espoir de matrimonion,
Auroit ouvert l’oreille à la tentation ;
Mais moi, nescio vos.

Lucile

Que tu dis de folies,
Et choisis mal ton temps pour de telles saillies !
Enfin je suis touchée au cœur sensiblement ;
Et si jamais celui de ce perfide amant,
Par un coup de bonheur, dont j’aurois tort, je pense,
De vouloir à présent concevoir l’espérance
(Car le ciel a trop pris plaisir à m’affliger,
Pour me donner celui de me pouvoir venger),
Quand, dis-je, par un sort à mes desirs propice,
Il reviendroit m’offrir sa vie en sacrifice,
Détester à mes pieds l’action d’aujourd’hui,
Je te défends surtout de me parler pour lui :
Au contraire, je veux que ton zèle s’exprime
À me bien mettre aux yeux la grandeur de son crime ;
Et même, si mon cœur étoit pour lui tenté
De descendre jamais à quelque lâcheté,
Que ton affection me soit alors sévère,
Et tienne comme il faut la main à ma colère.

Marinette

Vraiment, n’ayez point peur, et laissez faire à nous :
J’ai pour le moins autant de colère que vous ;
Et je serois plutôt fille toute ma vie,
Que mon gros traître aussi me redonnât envie.
S’il vient…




Scène II, 5



Albert

Rentrez, Lucile, et me faites venir
Le précepteur : je veux un peu l’entretenir,