Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 1.djvu/313

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ma visite ; mais votre réputation vous attire cette méchante affaire, et le mérite a pour moi des charmes si puissants, que je cours partout après lui.

Magdelon

Si vous poursuivez le mérite, ce n’est pas sur nos terres que vous devez chasser.

Cathos

Pour voir chez nous le mérite, il a fallu que vous l’y ayez amené.

Mascarille

Ah ! je m’inscris en faux contre vos paroles. La renommée accuse juste en contant ce que vous valez ; et vous allez faire pic, repic et capot tout ce qu’il y a de galant dans Paris.

Magdelon

Votre complaisance pousse un peu trop avant la libéralité de ses louanges ; et nous n’avons garde, ma cousine et moi, de donner de notre sérieux dans le doux de votre flatterie.

Cathos

Ma chère, il faudroit faire donner des siéges.

Magdelon

Holà ! Almanzor.

Almanzor

Madame.

Magdelon

Vite, voiturez-nous ici les commodités de la conversation.

Mascarille

Mais au moins, y a-t-il sûreté ici pour moi ? Almanzor sort.

Cathos

Que craignez-vous ?

Mascarille

Quelque vol de mon cœur, quelque assassinat de ma franchise[1]. Je vois ici deux[2] yeux qui ont la mine d’être de fort mauvais garçons, de faire insulte aux libertés, et de traiter une âme de Turc à More. Comment diable ! D’abord qu’on les approche, ils se mettent sur leur garde meurtrière. Ah ! par ma foi, je m’en défie ! et je m’en vais gagner au pied,

  1. Dans le sens d'indépendance.
  2. VAR. Je vois ici des yeux.