Qui m’afflige un endroit que je ne veux pas dire ;
Cependant arrivé vous sortez bien et beau
Sans prendre de repos, ni manger un morceau.
Ce grand empressement n’est point digne de blâme
De l’hymen de Célie, on alarme mon âme ;
Tu sais que je l’adore, et je veux être instruit
Avant tout autre soin de ce funeste bruit.
Oui ; mais un bon repas vous serait nécessaire
Pour s’aller éclaircir, Monsieur, de cette affaire,
Et votre cœur sans doute en deviendrait plus fort
Pour pouvoir résister aux attaques du sort.
J’en juge par moi-même, et la moindre disgrâce
Lorsque je suis à jeun, me saisit, me terrasse ;
Mais quand j’ai bien mangé, mon âme est ferme à tout,
Et les plus grands revers n’en viendraient pas à bout.
Croyez-moi, bourrez-vous et sans réserve aucune,
Contre les coups que peut vous porter la fortune,
Et pour fermer chez vous l’entrée à la douleur,
De vingt verres de vin entourez votre cœur.
Je ne saurais manger.
Votre dîné pourtant serait prêt tout à l’heure.
Tais-toi, je te l’ordonne.
J’ai de l’inquiétude et non pas de la faim.
Et moi j’ai de la faim, et de l’inquiétude
De voir qu’un sot amour fait toute votre étude.
Laisse-moi m’informer de l’objet de mes vœux,
Et sans m’importuner, va manger si tu veux.