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Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 1.djvu/35

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xxiii
DU THÉÂTRE EN FRANCE

est intitulée Mariamne ; la meilleure de ses tragi-comédies Félicemène, et dans ce dernier genre il se rapproche beaucoup, au comique près, de la comédie noble, absolument inconnue avant lui. Hardi, qui ne suivait que son caprice, a semé à profusion dans ses œuvres dramatiques les bizarreries les plus étranges et surtout les bizarreries du style : ses amants appellent leur maîtresse ma sainte ; Mariamne traite Hérode, son mari, de mâtin, et dans Clariclée on entend un chœur d’Éthiopiens s’écrier :

Sa prière fendroit l’estomac d’une roche.

Outre les tragédies empruntées aux traditions grecque, romaine ou hébraïque et aux légendes des saints, on trouve encore au seizième siècle et dans les premières années du dix-septième, quelques tragédies nationales, telles que la Coligniade, la Guisiade, la Mort de Henri IV, où l’on voit figurer des chœurs de seigneurs, des chœurs du Parlement et des chœurs de garçons et de damoiselles[1].

Le vieux genre de la sotie, au milieu de cette rénovation universelle, se continuait encore. Des farceurs restés célèbres jusqu’à nos jours, Turlupin, Bruscambille, Gros-Guillaume, Gaultier Garguille, obtenaient à Paris, auprès de la foule, un succès de fou rire par les mots de gueule, dont leurs parades étaient remplies, car ces acteurs ne jouaient que des parades qui étaient pour la plupart des imitations de farces italiennes[2]. Quant aux genres comique,

  1. Les principales tragédies de cette époque sont : Électre, Hécube, de Baïf ; Médée, de la Péruse ; Gaspard de Coligny, Pharaon, de Chantelouve ; Daïre, Alexandre, Saül, Pâris et Œnone, de Jean de la Taille ; Didon, Adonis (tragédie allégorique sur la mort de Charles IX), de Lebreton ; Didon, de Guill. de Lagrange ; Méléagre, de P. de Bousi ; Attilée, de J. de Beaubreuil ; Holopherne, d’Adrien d’Amboise ; Esther, Vasthi, de P. Mathieu ; Cléopâtre captive, Didon se sacrifiant, de Jodelle ; Hippolyte, la Troade, Antigone, Porcie, Cornélie, Marc-Antoine, Bradamante, de Robert Garnier ; Octavie, de Géliot ; la Machabée, de J. de Virey, etc. Nous renvoyons encore à Brunet, ubi suprà, pour les détails bibliographiques.
  2. Les farces sont très-nombreuses au seizième siècle. Tout ce qu’il y a de plus important dans ce genre se trouve dans le Recueil intitulé : Farces, Moralités et Sermons joyeux, publié d’après le manuscrit de la Bibliothèque Nationale, par Leroux de Lincy et Fr. Michel, Paris, 1837, 4 vol. in-12. Il faut voir, du reste, pour toute cette période, le travail de M. Sainte-Beuve : Hist. du Théâtre français au seizième siècle.