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J.-B. POQUELIN DE MOLIÈRE.

mois après, le 30 juillet 1664, Molière, qui se trouvait à Fontainebleau à l’occasion des fêtes offertes au cardinal-légat, fit une lecture de sa pièce devant l’envoyé du saint-siége, et obtint son approbation. Le 25 septembre, Tartuffe fut joué pour la seconde fois à Villers-Cotterets, chez Monsieur, et, pour la troisième fois, chez le prince de Condé, au Raincy[1] ; mais ce fut seulement le 5 août 1667, pendant que le roi était en Flandre, que Molière donna au public la comédie que depuis trois ans il lui était défendu de jouer, en la déguisant faiblement sous le titre de l’Imposteur. Le lendemain, le premier président du parlement donna ordre de cesser la représentation. Molière répondit en vain qu’il était autorisé ; il fallut obéir, mais tout en obéissant, il écrivit un placet que deux de ses compagnons allèrent porter au roi devant Lille. « Il y rappelait avec chaleur et dignité, nous apprend M. Bazin, la permission qu’il disait avoir reçue du roi ; il le sommait respectueusement de faire observer sa parole par ceux qui tenaient de lui leur autorité ; il semblait même vouloir l’inquiéter pour ses divertissements à venir. » « Il est très-assuré, disait-il, qu’il ne faut plus que je songe à faire des comédies, si les Tartuffes ont l’avantage. » Pendant que ce message faisait sa route, une autre autorité venait de se prononcer. L’ancien précepteur du roi, l’archevêque de Paris, publiait (11 août) un mandement qui défendait « à toutes personnes de voir représenter, lire ou entendre réciter la comédie nouvellement nommée l’Imposteur, soit publiquement, soit en particulier, sous peine d’excommunication. » Cette interdiction allait, comme on voit, beaucoup plus loin que celle dont le parlement voulait maintenir l’effet. Elle atteignit tous ceux qui s’étaient mis jusque-là hors du public, le roi compris. Cependant les comédiens députés furent gracieusement reçus au camp devant

  1. Voy. la notice en tête de Tartuffe.