Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 2.djvu/422

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865Certes je ne sais pas quelle chaleur vous monte :
Mais à convoiter, moi, je ne suis point si prompte :
Et je vous verrais nu du haut jusques en bas,
Que toute votre peau ne me tenterait pas.

Tartuffe
Mettez dans vos discours un peu de modestie,

870Ou je vais sur-le-champ vous quitter la partie.

Dorine
Non, non, c’est moi qui vais vous laisser en repos,

Et je n’ai seulement qu’à vous dire deux mots.
Madame va venir dans cette salle basse,
Et d’un mot d’entretien vous demande la grâce.

Tartuffe
875Hélas ! très volontiers.


Dorine, à part.
Hélas ! très volontiers. Comme il se radoucit !

Ma foi, je suis toujours pour ce que j’en ai dit.

Tartuffe
Viendra-t-elle bientôt ?


Dorine
Viendra-t-elle bientôt ? Je l’entends, ce me semble.

Oui, c’est elle en personne, et je vous laisse ensemble.



Scène 3

Elmire, Tartuffe.


Tartuffe
Que le ciel à jamais, par sa toute-bonté,

880Et de l’âme et du corps vous donne la santé,
Et bénisse vos jours autant que le désire
Le plus humble de ceux que son amour inspire !

Elmire
Je suis fort obligée à ce souhait pieux.

Mais prenons une chaise, afin d’être un peu mieux.

Tartuffe, assis.
885Comment de votre mal vous sentez-vous remise ?


Elmire, assise.
Fort bien ; et cette fièvre a bientôt quitté prise.


Tartuffe
Mes prières n’ont pas le mérite qu’il faut

Pour avoir attiré cette grâce d’en haut :
Mais je n’ai fait au ciel nulle dévote instance