Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 3.djvu/145

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ORONTE.

Mais encore, pourquoi ?

SBRIGANI.

L’est, montsir, que sti montsir Oronte donne son fille en mariage à un certe montsir de Pourcegnac.

ORONTE.

Hé bien ?

SBRIGANI.

Et sti montsir de Pourcegnac, montsir, l’est un homme que doivre beaucoup grandement à dix ou douze marchanes flamannes qui être venu ici.

ORONTE.

Ce monsieur de Pourceaugnac doit beaucoup à dix ou douze marchands ?

SBRIGANI.

Oui, montsir ; et, depuis huite mois, nous afoir obtenir un petit sentence contre lui ; et lui a remettre à payer tou ce créanciers de sti mariage que sti montsir Oronte donne pour son fille.

ORONTE.

Hon ! hon ! il a remis là à payer ses créanciers ?

SBRIGANI.

Oui, montsir, et avec un grant défotion nous tous attendre sti mariage.

ORONTE, à part.

L’avis n’est pas mauvais. (Haut.) Je vous donne le bonjour.

SBRIGANI.

Je remercie, montsir, de la faveur grande.

ORONTE.

Votre très humble valet.

SBRIGANI.

Je le suis, montsir, obliger plus que beaucoup du bon nouvel que montsir m’afoir donné. (Seul, après avoir ôté sa barbe et dépouillé l’habit de Flamand qu’il a par-dessus le sien.) Cela ne va pas mal. Quittons notre ajustement de Flamand, pour songer à d’autres machines ; et tâchons de semer tant de soupçons et de division entre le beau-père et le gendre, que cela rompe le mariage prétendu. Tous deux également sont propres à gober les hameçons qu’on leur veut tendre ; et, entre nous autres fourbes de la première classe, nous ne faisons