Page:Molière - Édition Louandre, 1910, tome 3.djvu/686

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béralde.

Oh çà ! mon frère, puisque voilà votre monsieur Purgon brouillé avec vous, ne voulez-vous pas bien que je vous parle du parti qui s’offre pour ma nièce ?

argan.

Non, mon frère : je veux la mettre dans un couvent, puisqu’elle s’est opposée à mes volontés. Je vois bien qu’il y a quelque amourette là-dessous, et j’ai découvert certaine entrevue secrète qu’on ne sait pas que j’aie découverte.

béralde.

Hé bien ! mon frère, quand il y auroit quelque petite inclination, cela seroit-il si criminel ? Et rien peut-il vous offenser, quand tout ne va qu’à des choses honnêtes, comme le mariage ?

argan.

Quoi qu’il en soit, mon frère, elle sera religieuse ; c’est une chose résolue.

béralde.

Vous voulez faire plaisir à quelqu’un.

argan.

Je vous entends. Vous en revenez toujours là, et ma femme vous tient au cœur.

béralde.

Hé bien ! oui, mon frère ; puisqu’il faut parler à cœur ouvert, c’est votre femme que je veux dire ; et, non plus que l’entêtement de la médecine, je ne puis vous souffrir l’entêtement où vous êtes pour elle, et voir que vous donniez, tête baissée, dans tous les pièges qu’elle vous tend.

toinette.

Ah ! monsieur, ne parlez point de madame ; c’est une femme sur laquelle il n’y a rien à dire, une femme sans artifice, et qui aime monsieur, qui l’aime… On ne peut pas dire cela.

argan.

Demandez-lui un peu les caresses qu’elle me fait ;

toinette.

Cela est vrai.

argan.

L’inquiétude que lui donne ma maladie ;

toinette.

Assurément.