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Page:Molière - Œuvres complètes, CL, 1888, tome 04.djvu/41

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Sosie.

Ensuite ? On m’est venu troubler et mettre en peine.

Amphitryon.

Et qui ?

Sosie.

Et qui ? Sosie, un moi, de vos ordres jaloux,
Que vous avez du port envoyé vers Alcmène,
Et qui de nos secrets a connaissance pleine,
Comme le moi qui parle à vous.

Amphitryon.

Quels contes !

Sosie.

Quels contes ! Non, Monsieur, c’est la vérité pure.
Ce moi plus tôt que moi s’est au logis trouvé ;
Et j’étais venu, je vous jure,
Avant que je fusse arrivé.

Amphitryon.

D’où peut procéder, je te prie,
Ce galimatias maudit ?
Est-ce songe ? Est-ce ivrognerie ?
Aliénation d’esprit ?
Ou méchante plaisanterie ?

Sosie.

Non : c’est la chose comme elle est,
Et point du tout conte frivole.
Je suis homme d’honneur, j’en donne ma parole,
Et vous m’en croirez, s’il vous plaît.
Je vous dis que, croyant n’être qu’un seul Sosie,
Je me suis trouvé deux chez nous ;
Et que de ces deux moi, piqués de jalousie,
L’un est à la maison, et l’autre est avec vous ;
Que le moi que voici, chargé de lassitude,
A trouvé l’autre moi frais, gaillard et dispos,
Et n’ayant d’autre inquiétude
Que de battre, et casser des os.

Amphitryon.