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LIVRE I, CHAP. VII

le pays latin. Très certainement, elle a poursuivi le système d’incorporations, d’où déjà était sortie la fusion de la triple cité. Mais actuellement, les peuplades contraintes par la voie des armes à entrer dans l’État romain, à titre de quartiers ou cantons romains, ne gardent plus une sorte d’indépendance relative, comme l’avaient fait les trois premières tribus ; elles sont totalement absorbées, et nulle trace n’est restée d’elles (p. 115.). Partout où s’étendait la puissance d’une cité latine, elle n’admettait jamais, dans ces temps reculés, l’existence d’un autre centre que le chef-lieu. Encore moins formait-elle au dehors des établissements indépendants et pareils à ceux des Phéniciens ou des Grecs ; lesquels envoyaient dans leurs colonies des émigrants, aujourd’hui leurs clients, demain leurs rivaux. Voyez, par exemple, comment Rome en agit avec Ostie. Il ne fut jamais question d’empêcher (on ne l’aurait pu en effet) la création d’une ville en ce lieu. Mais Rome se garda bien de lui accorder l’indépendance politique : les colons qui s’y établirent n’eurent pas de droits civiques locaux : ils conservèrent seulement avec ses privilèges ordinaires le titre de citoyens romains, qu’ils avaient eu déjà avant d’émigrer[1]. Le même principe servit à fixer le sort des cantons plus faibles soumis au plus fort en vertu de la loi de la guerre, ou d’une reddition volontaire. Leurs forteresses furent détruites ; leur territoire fut ajouté au territoire du vainqueur et les habitants s’en allèrent avec leurs dieux chercher une nouvelle patrie dans sa ville capi-

  1. C’est sur ces bases que se forma le système des colonies maritimes et civiles (colonia civium Romanorum). Séparées de fait de la métropole, ces colonies demeuraient légalement et politiquement dans sa dépendance : elles n’avaient point de volonté à elles, et elles se fondaient dans la capitale, comme le pécule du fils se fond dans le patrimoine du père. Elles étaient d’ailleurs affranchies du service militaire, mais à titre de garnisons permanentes.