Page:Monge - Coeur magnanime, 1908.djvu/26

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
28
CŒUR MAGNANIME

Son port, un peu hautain, dénotait une origine aristocratique ; en effet dans les renseignements recueillis jadis par Monsieur Solier au sujet des parents de Rodrigue, on avait appris que son père, orphelin de bonne heure, avait été élevé par une tante, sœur de sa mère : Mademoiselle de Martinenq, laquelle appartenait à la vieille noblesse de Provence. De plus Rodrigue portait à son cou, retenu par une chaîne d’or, un riche médaillon, cerclé de fines perles, et au centre duquel se détachait une fine miniature de la Madone del Pilar ; au revers était gravé un blason : il était certain que ce précieux bijou, que la jeune espagnole avait elle-même suspendu au cou de son fils, et que celui-ci n’avait jamais quitté, était un souvenir de famille…

Malgré sa fierté native le jeune homme s’attirait la sympathie de tous à cause de sa joyeuse et cordiale amabilité qui perçait bien vite l’enveloppe altière. Au moral il tenait de son père ce tempérament un peu à part, tout d’exubérance, de mouvement et de vie, mais où le cœur domine toujours et qui caractérise le français du midi.

Malgré cette dissemblance et peut-être à cause d’elle, les deux jeunes gens étaient profondément épris l’un de l’autre. Cet amour s’était soudain révélé au retour d’une longue absence d’Anne-Marie.

Madame Solier avait une sœur, beaucoup plus jeune qu’elle, et à qui elle avait servi de mère. Celle-ci était mariée et habitait de l’autre côté de la frontière. La mort, venait de lui ravir, presque subitement, dans tout l’éclat de son jeune printemps, une fille qu’elle adorait. La pauvre mère était inconsolable ! Madame Solier l’appela auprès d’elle ; mais vint le temps pour la